DELEUZE, cours à l’université de Vincenne, le 22/04/80, sur Leibniz et la compossibilité.
Extrait choisi dans son introduction, sur la création de concepts :
« La dernière fois, notre premier paragraphe était une espèce de présentation des concepts principaux de Leibniz. A l'arrière fond de ceci, il y avait un problème correspondant à Leibniz, mais évidemment beaucoup plus général, à savoir : qu'est-ce que c'est au juste que de faire de la philosophie, et, à partir d'une notion très simple : faire de la philosophie c'est créer des concepts, comme faire de la peinture c'est créer des lignes et des couleurs. Faire de la philosophie c'est créer des concepts parce que les concepts ce n'est pas quelque chose qui préexiste. Ce n'est pas quelque chose qui soit donné tout fait, et en ce sens il faut définir la philosophie par une activité de création : création de concepts. Cette définition semblait convenir parfaitement à Leibniz qui, précisément, dans une philosophie d'apparence fondamentalement rationaliste, se livre à une espèce de création exubérante de concepts insolites dont il y a peu d'exemples dans l'histoire de la philosophie.
Si les concepts sont l'objet d'une création, alors il faut dire que ces concepts sont signés. Il y a une signature, non pas que la signature établisse un lien entre le concept et le philosophe qui le crée, c'est beaucoup plus les concepts eux-mêmes qui sont des signatures. Tout ce premier paragraphe avait fait surgir un certain nombre de concepts proprement leibniziens. Les deux principaux qu'on avait dégagés, c'était inclusion et compossibilité. Il y a toutes sortes de choses qui sont incluses dans certaines choses, ou bien enveloppées dans certaines choses. Inclusion, enveloppement. Puis un tout autre concept, très bizarre, celui de compossibilité* : il y a des choses qui sont possibles en elles-mêmes mais qui ne sont pas compossibles avec une autre. »
*Voir à ce propos, l'article "compossibilité".
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