« Je dis qu’il faut être voyant, se faire voyant. Le poète se fait voyant par un long, immense et raisonné dérèglement de tous les sens. Toutes les formes d’amour, de souffrance, de folie ; il cherche en lui-même, il épuise tous les poisons, pour n’en garder que les quintessences. […] Il arrive à l’inconnu, et quand, affolé, il finirait par perdre l’intelligence de ses visions, il les a vues ! Qu’il crève dans son bondissement par les choses inouïes et innommables : viendront d’autres horribles travailleurs ; ils continueront par les horizons où l’autre s’est affaissé !
Limpide et tendre est mon âme…. Limpide et tendre est aussi tout ce qui n’est pas mon âme
Si l’un manque, l’autre aussi …. Et l’invisible est prouvé par le visible,
Avant que ce dernier ne devienne invisible et n’ai besoin de preuve à son tour.
À montrer le meilleur et à le séparer du pire, les siècles évaluent les siècles. »
Arthur RIMBAUD, extrait d'une Lettre à Paul DEMENY, 15 mai 1871, Pléiade, 2009, p. 343-344.
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